LE BLACK DEAD ARM (BDA)

Le Black Dead Arm (BDA) encore appelé Botryosphaeriose,  a été identifié en 1999 en France et pendant longtemps ses symptômes ont été attribués à l’esca. Cette maladie, touchant aussi bien les jeunes plantations que les plantations adultes, est aujourd’hui décrite dans de nombreux vignobles et se présente sous différentes formes.

Quels sont les symptômes foliaires du Black Dead Arm ou BDA ?

Des symptômes d’intensité différente

Les symptômes apparaissent à partir de la floraison suite à de fortes chaleurs et se manifestent régulièrement durant toute la période végétative. Ils touchent soit toute la plante, soit un seul bras. Ce sont les feuilles de la partie inférieure qui sont touchées les premières. Ils peuvent évoluer très rapidement (forme sévère appelée forme défoliatrice) ou alors passer par différents faciès (forme lente), conduisant à la chute prématurée des feuilles. Il convient de noter l’extrême variabilité de l’expression des symptômes d’une année sur l’autre. En effet, un pied malade une année peut très bien, l’année suivante, apparaître sain.

La forme sévère est caractérisée par un dessèchement des inflorescences ou des grappes et une défoliation rapide des rameaux qui peuvent se dessécher complètement ou en partie. Le dessèchement commence par leur partie apicale. Elle se différencie de l’apoplexie par le fait que les inflorescences ou les grappes sont tout d’abord desséchées et que les feuilles tombent avant le desséchement des rameaux.

La forme lente se traduit, quant à elle, par un retard de la maturité des raisins et une altération du feuillage pouvant donner un aspect de tigrure à la feuille. A un stade peu évolué de la maladie, les feuilles présentent des taches rouge vineux (cépages noirs) ou jaune vif (cépages blancs), et/ou des taches nécrotiques bordées par un liseré rouge vineux (cépages noirs) ou jaune vif (cépages blancs).

Leur évolution peut conduire par la suite à des symptômes foliaires similaires à la forme lente de « l’esca » en raison de l’éclaircissement des tissus, le rouge vineux devenant rouge clair et le vert prenant une couleur jaune clair.

A côté de cette forme d’expression il est aussi possible d’observer des zones nécrotiques plus ou moins développées  résultant d’une perte de turgescence de certaines zones de la feuille. Pour les cépages noirs, elles prennent une couleur gris-verdâtre alors que pour les cépages blancs elles sont de couleur plutôt gris orangeâtre.

Toutes ces formes d’expression d’intensité différentes (formes défoliatrices, différents faciès de la forme lente) peuvent être rencontrées chez la même plante.

Des affaiblissements de la végétation

Les plantes affectées se caractérisent aussi par la mort de bras, de coursons ou encore par la présence d’une végétation affaiblie. Ce dernier symptôme n’est cependant pas spécifique à une maladie. Il est le résultat d’un affaiblissement de la plante qui peut avoir différentes origines (Dépérissement de la Syrah, Pourridiés,…).

Une forme apoplectique

Elle est caractérisée par un flétrissement rapide de tout ou une partie de la végétation. Le feuillage, les rameaux et les grappes se dessèchent en quelques jours. Contrairement à la forme sévère du BDA appelée forme défoliatrice, les feuilles desséchées restent plus longtemps sur les rameaux et les grappes se dessèchent en dernier. Elle est usuellement rencontrée lors de périodes sèches ou de forts vents. Elle est due à une forte évapotranspiration qui n’est plus compensée par un afflux en eau suffisant à cause d’une faible quantité de bois fonctionnel. L’apoplexie peut être due à d’autres causes telles le pourridié, le pied noir, l’eutypiose, l’étranglement du porte-greffe par le greffon, la réalisation d’une très mauvaise taille, etc.

Quels sont les symptômes dans le bois du Black Dead Arm ou BDA ?

Dans le bois, cette maladie est caractérisée par la présence d’une bande brune située sous l’écorce, qui part du rameau malade et peut descendre jusqu’au niveau de la soudure, voire dans le porte-greffe. En coupe transversale dans le bois, elle se traduit par une zone de couleur jaune à orange, se limitant à quelques millimètres de profondeur dans laquelle les vaisseaux sont obstrués.

Le plus ou moins grand nombre de vaisseaux touchés, qui dépend également de la largeur de la bande brune ou de leur nombre, doit avoir une influence sur la plus ou moins grande sévérité des symptômes observés dans le vignoble allant de la forme lente jusqu’à la forme sévère dite défoliatrice. Il est important de signaler que la bande brune n’est pas présente chez les ceps affaiblis ou apoplectiques.

Des nécroses sectorielles de couleur grise peuvent être également observées chez les ceps malades.

Quelles différences avec l’Esca ?

Plusieurs critères permettent de distinguer la forme lente du Black dead arm à celle de l’esca.

  • La date d’apparition des symptômes : les premiers symptômes apparaissent à partir de la floraison pour le Black dead arm alors que pour l’esca, ils n’apparaissent qu’autour de la véraison.
  • L’intensité des couleurs des taches sur les feuilles : pour les cépages blancs, le jaune est vif pour le BDA alors que pour l’’esca il est plutôt blanc. Pour les cépages noirs, il n’y a pas de jaunissement sur les feuilles et le rouge est beaucoup plus foncé. Cette distinction est difficile à effectuer à partir de la véraison en raison de l’éclaircissement des tissus. Le rouge vineux devient rouge clair et le vert prend une teinte jaune clair.

Concernant la forme apoplectique, il n’est pas possible de les distinguer sans couper les ceps. Cette forme d’expression est non spécifique à une maladie.

Quels sont les champignons associés au Black Dead Arm ou BDA ?

Parmi les champignons associés au BDA, les espèces les plus communes sont Diplodia seriata, Neofusicoccum parvum et Diplodia mutila. Ces micro-organismes sont aussi trouvés chez d’autres plantes ligneuses. Leur cycle biologique est encore mal connu. La dissémination se fait par voie aérienne surtout durant la période végétative. L’inoculum se conserve sur les plaies de taille anciennes, les écorces des coursons, ainsi que sur le tronc et les bois de taille laissés au sol. La manière dont ces champignons pénètrent dans la plante n’est pas clairement établie. La propagation en pépinière par les greffons, porte-greffes et greffés-soudés est possible

Quelle méthode de lutte chimique ou biologique contre le Black Dead Arm  ?

Aujourd’hui, peu de spécialités sont disponibles pour lutter contre le Black dead arm. Une préparation phytopharmaceutique ne peut être mise sur le marché que si elle a reçu une autorisation du Ministère de l’Agriculture, de l’Agroalimentaire et de la Forêt. L’Autorisation de Mise sur le Marché (AMM) est délivrée pour un usage précis. Elle inclut une évaluation des bénéfices (efficacité), ainsi que des risques pour l’applicateur, le consommateur et l’environnement. Comme la liste des produits homologués évolue en permanence, il est conseillé de consulter le site https://ephy.anses.fr. Il permet également de connaître les moyens de protection recommandés pour chacune des spécialités.

A ce jour, il n’existe pas de méthode de lutte chimique validée au vignoble. Le seul produit homologué était l’arsénite de sodium. Il a été interdit depuis novembre 2001, en raison de ses effets toxiques sur la santé humaine. Une étude réalisée par la MSA en 2000, avait montré que les protections utilisées n’étaient pas suffisantes pour assurer une bonne protection des utilisateurs.

En lutte biologique, un produit à base de Trichoderma, l’Esquive, (Société Agrauxine) a été  homologué pour l’esca/BDA en protection des plaies de taille. Il est appliqué à la dose de 100 G/L en badigeonnage et de 4 kg / ha en pulvérisation. Selon la société Bayer, « l’efficacité d’Esquive® WP étant partielle et la démonstration au champ n’étant pas tout à fait établie en l’état actuel des connaissances, il est essentiel d’accompagner son utilisation de mesures culturales prophylactiques (taille tardive, recépage et limitation de l’inoculum dans l’entourage des parcelles traitées par élimination des souches de vigne mortes) »,

Quelles méthodes de lutte prophylactique contre le Black Dead Arm ?

Ce sont les seules méthodes de lutte efficaces. Il est important de les mettre en place dès la plantation : :

  • Ne pas effectuer de rendements importants les premières années dans le cas de nouvelles plantations. Des rendements trop conséquents peuvent être très préjudiciables pour leur pérennité et favoriser l’apparition des symptômes précoces.
  • Maîtriser la vigueur en adaptant la conduite de la vigne et la fertilisation. Une vigueur trop importante est un facteur favorable à l’expression de la maladie. Dans le cas de nouvelles plantations, il faut raisonner au mieux le choix du porte-greffe et soigner le plantier pour limiter les excès de vigueur.
  • Eviter les charges excessives. Une vigne trop productrice est de manière générale plus sensible à la maladie.
  • Enlever les  souches mortes de la parcelle.
  • restaurer les pieds malades (recépage, regreffage).

Une expérimentation menée au Lycée agricole de Saintes, mise en place en 1990 par le groupe de travail Eutypiose Charentes et suivie par la Station Viticole du BNIC a montré l’inefficacité de la taille tardive réalisée en période de pleurs à l’égard de l’esca et du BDA. En effet, les ceps suivis présentent autant de symptômes foliaires caractéristiques de ces maladies lorsqu’ils sont taillés en période de repos ou de pleurs. Malgré la protection hivernale assurée par les sarments et la protection mécanique des pleurs, ces champignons possèderaient la capacité de pénétrer par les plaies de taille après la période de pleurs ou l’aptitude à contaminer d’autres plaies réalisées lors des opérations en vert (épamprage ou ébourgeonnage). La taille tardive s’avère par contre une méthode prophylactique très efficace dans la lutte contre l’eutypiose. La Station Viticole du BNIC a également montré que même s’ils possédaient une certaine efficacité dans la protection des plaies de taille face à l’eutypiose, les mastics ou encore l’escudo (interdit depuis 2007), s’avéraient sans efficacité sur l’expression des symptômes foliaires d’esca ou de BDA.

Quelle est l’importance des champignons responsables du BDA en pépinières ?

Des enquêtes réalisées auprès des pépiniéristes du Sud-Est et du Sud-Ouest ont montré que les plants, à la sortie de la pépinière hébergeaient la plupart des champignons associés aux maladies du bois. Leur présence dans les plants est plus ou moins importante selon les lots analysés, en fonction du matériel végétal et/ou du processus de fabrication des plants. Les pépiniéristes ne disposent à ce jour d’aucun moyen leur permettant de trier les bois contaminés pour les éliminer. Les étapes-clés du processus d’élaboration des plants, au cours desquelles se produisent les contaminations ont pu être identifiées : il s’agit des étapes de réhydratation et de stratification qui se déroulent dans des conditions chaudes et humides, particulièrement favorables à la croissance des champignons impliqués. Parmi les différentes méthodes de désinfection testées à ce jour, seul le traitement à l’eau chaude effectué dans les conditions préconisées dans le traitement du phytoplasme de la flavescence dorée (45 minutes à 50°C) a montré des résultats intéressants. Certains champignons y sont sensibles et ainsi éliminés des plants. Cependant, le suivi de parcelles dans le vignoble montre que le traitement à l’eau chaude n’a aucune influence sur l’expression de la maladie en raison de nouvelles contaminations dans le vignoble.

Deux autres stratégies qui permettraient de limiter la présence des champignons associés aux maladies du bois dans les plants (greffes-boutures herbacées, choix du matériel végétal à l’entrée de la pépinière) ont été évaluées par notre institut. Il ressort de cette étude :

– qu’aucune modification du statut sanitaire des plants ne peut être espérée par la mise en œuvre de mesures de sélection, même drastiques, des boutures, greffons et porte-greffes. Le déclassement éventuel d’une parcelle pour la production de matériel végétal en raison de ses taux élevés de mortalité ou de maladie ne semble pas nécessaire. Il ne paraît pas utile non plus de marquer les ceps malades pour éviter de prélever les greffons selon ces études car les champignons sont autant trouvés sur les sarments malades ou non.

– que la production de plants totalement exempts de champignons pathogènes ne serait vraisemblablement pas non plus significativement efficace dans la lutte contre ces maladies, étant donné les contaminations très rapides constatées sur le matériel. Les champignons proviendraient de parcelles avoisinantes ou d’autres plantes hôtes, il est connu que les champignons associés aux maladies du bois sont rencontrés chez un grand nombre de plantes ligneuses.

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