LA FILTRATION OU MICROFILTRATION TANGENTIELLE

Contrainte environnementale liée à la gestion des terres de filtration, la filtration tangentielle suscite de plus en plus d’intérêts tant auprès des œnologues que des industriels.

Quel est le principe de la filtration ou microfiltration tangentielle ?

La filtration ou microfiltration tangentielle consiste à faire circuler le liquide à filtrer parallèlement à une membrane poreuse. Sous l’action d’un gradient de pression, le liquide passe au travers de la membrane et se clarifie. Le flux tangentiel crée des turbulences, des contraintes de cisaillement qui limitent l’accumulation de particules à la surface de la membrane, et retarde son colmatage. Malgré le flux tangentiel, il se produit un colmatage progressif des membranes. Pour limiter ce phénomène, des rétro-filtrations (back-pulses) ou inversions de flux doivent être réalisées à intervalles réguliers, en général toutes les 2 ou 3 minutes.

Quels sont les avantages de la filtration ou microfiltration tangentielle ?

Environnemental : la filtration ou microfiltration tangentielle ne requiert pas d’adjuvants de filtration et ne produit pas de déchets solides
D’emploi : la microfiltration tangentielle est automatique et le filtre facile d’utilisation
En terme de sécurité alimentaire : la microfiltration tangentielle permet l’éliminination de certains micro-organismes, dont les levures, et peut donc permettre, comme dans le cas du mutage des vins doux ou liquoreux, de diminuer les doses de soufre utilisées
Conservation des caractéristiques organoleptiques (potentiel aromatique et polyphénolique) par rapport à des filtration sur terres
Clarification en une seule séquence de filtration avec une turbidité finale inférieure à 1 NTU, et ce même pour des liquides chargés
Gain de main d’oeuvre non négligeable

Et ses inconvénients ?

  • le prix d’achat d’un filtre tangentiel est élevé par rapport à un filtre frontal (4 à 5 fois supérieur). L’investissement varie de 40 000 € à des centaines de milliers d’euros. En prestation de service, la filtration tangentielle est proposée à environ 3 €/hl
  • consommation énergétique importante
  • importante consommation d’eau nécessaire pour le lavage et la régénération des membranes. Ces quantités sont très variables selon les matériels et les conditions d’utilisation (de quelques litres à plus de 20 litres par hl filtré)
  • la microfiltration tangentielle est complètement automatique. On ne peut pas choisir un niveau de turbidité finale, ce qui parfois est susceptible de gêner l’utilisateur

Quelles sont les membranes utilisées ?

Les membranes sont caractérisées par leur porosité (ou pourcentage de vide), leur perméabilité, le diamètre moyen des pores et la répartition des diamètres autour de cette moyenne. En œnologie, des diamètres moyens de 0,2 µm sont actuellement les plus utilisés. Elles sont constituées soit d’une couche filtrante homogène, soit d’une couche support et d’une couche filtrante de très faible épaisseur et peuvent être organiques, élaborées à partir de polymères de synthèse ou minérales, constituées de couches de céramique poreuse. Les premières membranes testées en œnologie ont été des membranes minérales mais ont rapidement été accusées de retenir trop de macromolécules. Elles ont été remplacées par des membranes organiques. Des nouvelles membranes minérales, adaptées au vin et résistantes aux hautes températures, aux produits chimiques et aux hautes pressions ont été développées par l’INRA en collaboration avec un industriel.

Coupe transversale des différents profils de membranes céramiques en fonction du produit à filtrer (source SIVA)

 

Quelles sont en oenologie les applications de la filtration ou microfiltration tangentielle ?

La microfiltration tangentielle peut intervenir aux différents stades de l’élaboration et de stabilisation des vins :

  • La filtration des bourbes de décantation statique ou de flottation, avec généralement des membranes et dispositifs spécifiques
  • Le mutage des vins doux ou liquoreux par élimination de la biomasse levurienne
  • En filtration précoce des vins, après fermentation alcoolique ou fermentation malolactique
  • Stabilisation microbiologique des vins où le risque de déviation est important (Brettanomyces). Dans ce cas précis, la filtration tangentielle constitue une alternative aux technologies curatives généralement utilisées comme la flash-pasteurisation ou le sulfitage massif
  • Filtration des vins avant embouteillage en alternative à la filtration par alluvionnage, suivie d’une filtration finale sur plaques ou cartouche. C’est l’application la plus courante de la filtration tangentielle

La filtration tangentielle connait un développement très important depuis quelques années, notamment pour remplacer les filtres utilisant du kieselguhr ou de la perlite: filtres rotatifs sous vide, filtres presse, filtres à alluvionnage. En couplage avec d’autres procédés, la microfiltration tangentielle se développe également pour des opérations de stabilisation en ligne, comme la stabilisation tartrique ou la stabilisation protéique. En revanche, elle reste encore peu utilisée pour la clarification des mouts, notamment ceux issus de chaines de traitement thermique de la vendange, les débits obtenus actuellement étant encore trop faibles.

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