LES NORISOPRÉNOÏDES

Que sont les norisoprénoïdes et quels sont les descripteurs qui y sont associés ?

Les norisoprénoïdes sont des produits issus de la dégradation enzymatique oxydative des caroténoïdes. Présents dans le raisin sous forme de précurseurs glycosidiques, leur hydrolyse – enzymatique ou chimique – conduit à la formation de composés odorants qui contribuent à l’arôme du vin. Parmi les norisoprénoïdes les plus importants figurent  la β-damascenone, la β-ionone, TPB, TDN et vitispirane. La β-damascenone et la β-ionone sont généralement présentes dans tous les vins au-dessus de leur seuil de détection et jouent le rôle d’exhausteur de l’arôme fruité. La β-ionone peut également être responsable de notes de violette. Le TDN et le TPB sont liés à un vieillissement atypique et produisent une odeur de kérosène. Cet arôme peut être positif pour la qualité du vin lorsque l’intensité est faible, alors qu’il est perçu comme néfaste à forte intensité. La vitispirane participe, elle, aux notes camphrées.

Dans quels cépages retrouve-t-on des norisoprénoïdes ?

Les norisoprénoïdes sont présents de manière variable selon le cépage. A titre d’exemple, le TDN apparait principalement dans les vins élaborés à partir du cépage Riesling, lui donnant l’arôme caractéristique de pétrole. On trouve en revanche la β-damascenone et la β-ionone dans la majorité des variétés rouges en quantités comprises entre 250 et 4000 ng/L. Ce type de molécule peut intervenir dans la typicité de certains cépages comme la Négrette lors de l’expression des arômes de violette.

Quels sont les facteurs viticoles influençant la teneur des vins en norisoprénoïdes ?

  • La conduite au vignoble :

Au niveau de la conduite du vignoble, la gestion de la végétation est l’un des leviers permettant d’agir sur la concentration en norisoprénoïdes. L’exposition au soleil favorise la biosynthèse des caroténoïdes, précurseurs dans les baies, notamment au cours de la croissance herbacée des raisins. Ces composés se dégradent ensuite entre véraison et maturité pour produire les norisoprénoïdes odorants. Une étude menée par l’IFV Sud-Ouest a montré que les concentrations de β-damascenone et β-ionone sous formes libre et conjuguée augmentent après un effeuillage. Réalisé sur les deux faces du rang à la mi-véraison, celui-ci a permis d’augmenter la teneur en β -ionone dans les vins de plus de 20% en 2011 et 2012.

Il a par ailleurs été montré que la concentration de précurseurs de TDN est jusqu’à deux fois plus élevée dans les baies exposées à la lumière.

  • La maturité et la date de récolte :

La concentration en norisoprénoïdes augmente avec la maturité mais diminue cependant vers la fin de la maturation.

  • L’état hydrique de la vigne :

L’alimentation hydrique de la vigne joue un rôle important sur la quantité de norisoprénoïdes retrouvée dans les vins. Le stress hydrique entraîne une augmentation significative de la production d’enzymes liées aux voies métaboliques de production d’isoprénoïdes (unités de base), ce qui peut entraîner une augmentation de la production en norisoprénoïdes.

  • Le climat et l’altitude :

L’influence du climat et de l’altitude sur la concentration en norisoprénoïdes est en revanche moins bien comprise. Des études associent la forte concentration de TDN à des climats plus chauds alors que d’autres auteurs ont établi un lien entre des concentrations plus élevées et les climats froids. L’explication pourrait être due à une interaction du pH des vins avec le climat. Un pH plus faible entraîne une libération plus élevée de TDN. Aucune corrélation significative n’a été trouvée entre l’altitude et les concentrations de β-ionone ou β-damascenone.

Concentrations en β-ionone mesurées dans des vins de Négrette élaborés à deux dates de récolte. Les raisins ont été vendangés à à une semaine d’intervalle.

Impact de l’effeuillage à la mi-véraison sur la teneur en β-ionone dans les vins de Négrette. Résultats 2011-2012.

Quels sont les facteurs œnologiques influençant la teneur des vins en norisoprénoïdes ?

  • La macération pelliculaire :

Les précurseurs glycosidiques de norisoprénoïdes se trouvent en plus grande concentration dans les pellicules des raisins. L’utilisation de techniques de macération permet d’obtenir des vins à plus forte teneur en glycosides et donc à plus fort potentiel en norisoprénoïdes. Toutefois, il convient de garder à l’esprit que cette technique d’extraction n’est pas sélective et qu’elle se justifie sur raisins sélectionnés, sains et de bonne maturité.

  • Les préparations enzymatiques :

Il existe également des préparations enzymatiques qui peuvent favoriser une plus grande extraction et hydrolyse des précurseurs de norisoprénoïdes. L’utilisation de certaines de ces préparations présente cependant un risque associé à la production de phénols volatils qui peuvent nuire à l’arôme des vins produits.

  • La fermentation :

La fermentation est une étape clé pour la concentration finale en norisoprénoïdes, car les processus chimiques et microbiologiques qui s’y déroulent modifient la composition initiale en ces composés. La proportion de norisoprénoïdes libérés dépend à la fois de la levure utilisée et de la composition initiale du moût. Les levures sont capables de libérer des norisoprénoïdes dans des proportions différentes selon les conditions de fermentation. Il est alors possible de sélectionner les souches ayant une plus grande capacité à produire ces composés ; elles peuvent être utilisées seules ou en fermentation séquentielle, avec des levures non-Saccharomyces suivies par des Saccharomyces.

  • L’élevage et la conservation :

Des études indiquent que tous les norisoprénoïdes ne se comportent pas de la même façon pendant le vieillissement et le stockage. La β-damascenone et la β-ionone diminuent toutes deux pendant le vieillissement, tandis que le TDN tend à augmenter. Dans le cas de ce composé, il existe une dépendance au pH puisqu’il a été observé que dans les vins ayant subi une fermentation malolactique, l’augmentation était moindre. La présence de soufre libre diminue la concentration de TDN et évite la dégradation oxydative du vitispirane. De même, la présence de soufre et l’absence d’oxygène dans le milieu peuvent empêcher la dégradation de la β-ionone pendant le vieillissement.

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