Taille tardive de la vigne
Quelques conseils appliqués pour sa pratique
En préalable, rappelons que la taille tardive de la vigne a deux objectifs appliqués :
- Retarder le débourrement pour éviter l’occurrence de gel de printemps
- Retarder le débourrement et les autres stades phénologiques dont surtout la maturation du raisin pour vendanger plus tardivement en période fraiche.
Est-ce que la taille pré-débourrement peut retarder le débourrement des bourgeons latents de vigne ?
- Taille durant l’endodormance (en général de novembre à janvier, sachant que les bourgeons latents de vigne entrent en dormance dès le mois de juillet-aout pour la partie lignifiée des sarments) : ne retarde par le débourrement
- Taille durant l’écodormance (en général de janvier à mars, sachant qu’il faut environ 8-10 jours à des températures moyennes journalières ≤ +8°C pour lever l’endodormance) : ne retarde par le débourrement
- Taille durant l’écodormance au moment des pleurs de la vigne (reprise de l’activité du système racinaire) : retarde le débourrement en moyenne de 6 jours en fonction de l’interaction cépage x environnement (à expérimenter et calibrer).
Comment retarder le débourrement au-delà de 6 jours suivant le principe d’acrotonie des sarments ?
Trois façons de faire sur le terrain :
1) Prendre comme témoin 10 ceps taillés pré-débourrement en endodormance ou en écodormance mais avant les pleurs et s’en servir de base pour tailler post débourrement à maximum 30 à 50% du débourrement (stages BBCH 09 – 10 ; figure 1) de ces témoins taillés pré-débourrement. Suivant l’interaction cépage x environnement, la date de débourrement des bourgeons latents de la base des sarments peut être retardée de 8 à 12 jours.
2) Tailler quand la période de gel post-débourrement est passée (déjà utilisé sur le terrain mais risqué si gel très tardif car si la taille est trop tardive (au-delà des stades BBCH 13 par rapport à un témoin taillé en hiver pré-débourrement), cela peut retarder les autres stades phénologiques et entrainer des pertes de fertilité/rendement !) dues à l’épuisement des réserves carbonées des parties pérennes de la vigne suite au développement des jeunes rameaux primaires pré taille tardive (figure 3 & 4).
3) Tailler quand les 2 ou 3 premiers rameaux primaires développés au sommet des sarments non encore taillés post-débourrement ont atteint en moyenne le stade 3-5 feuilles déployées (stades BBCH entre 11 et 13). Suivant l’interaction cépage x environnement, la date de débourrement des bourgeons latents de la base des sarments peut être retardée de 8 à 12 jours (figure 2).
4) Afin de favoriser une acrotonie forte il est recommandé de laisser sur la baguette un nombre de bourgeons latents ≥ à 8 et de laisser la baguette (sarment) en position verticale (figure 2).

Figure 1 : (a) & (b) : Exemples de bourgeon de vigne en cours de développement (débourrement : BBCH 09).

Figure 2 : (a) : Exemple de sarment (Syrah) non encore taillé dont les bourgeons latents du sommet se sont développés inhibant les bourgeons de la base (acrotonie ; photo prise environ 8 jours après la date de débourrement) ; (B) : Exemple de dégâts de gel de printemps sur cépage Ugni blanc (Cognac, 2019).

Figure 2 : Exemple de taille très tardive (Syrah) soit environ 15 jours après la date « normale » de débourrement qui montre l’importance du développement des rameaux primaires sur les sarments. A ce stade de développement de la vigne, l’acrotonie des sarments est très réduite et au moins 50% des bourgeons de la base des sarments se sont développés (avec du retard par rapport aux rameaux primaires développés au sommet du sarment). La vitesse de croissance des rameaux primaires dépend du phyllochrone (temps thermique en base+10°C pour voir une nouvelle feuille, mais aussi de l’état hydrique et azoté de la vigne et des réserves carbonées des parties pérennes dont racines, troncs et charpente).
La figure 3 illustre l’évolution du développement des grappes suite à différentes dates de taille pré et post débourrement. Seules les dates de taille tardives post débourrement (au-delà de 8-12 jours, lorsque 30% des bourgeons ont débourré) peuvent entrainer un retard des stades phénologiques (floraison, véraison et dates de vendange) et donc du développement de la maturation des baies (figure 3). A calibrer par cépage x climat x dates de taille !

Figure 3 : Exemple sur grappes et sur baies (Syrah) des conséquences d’une taille tardive très tardive post débourrement qui a provoqué un retard important de l’ensemble des stades phénologiques.
Contraintes de la taille tardive
- Logistique (organisation du chantier de taille en fonction de la surface des vignobles à tailler) et coûts associés ; sauf pour taille mécanique
- Difficile de prévoir le début des pleurs suivant l’interaction cépage x environnement (et parfois il n’y a pas de pleurs pré-débourrement).
- Prévision de la durée des pleurs suivant l’interaction cépage x environnement
- Prévision de la date de débourrement suivant l’interaction cépage x environnement (il y a des modèles basés sur la température en base +5°C ou +10°C qui permettent la prédiction du débourrement de la vigne).
- Difficile de prévoir les dates, l’intensité et de la durée du gel de printemps
- une date de taille post débourrement trop tardive (mal positionnée si certains principes physiologiques ne sont pas respectés (ou connus) comme le concept de phyllochrone ou l’importance des réserves carbonées) peut entraîner des pertes de rendement de 20 à 80%.
Bibliographie