Systèmes sans herbicides basés sur l’enherbement sous le rang

 Laure GONTIER1*, Christophe GAVIGLIO1, Xavier DELPUECH2

1IFV Sud-ouest, V’innopôle, BP22, F-81310 Lisle sur Tarn, France
2IFV Rhône-Méditerranée, 361 rue J.F. Breton, BP5095, F-34196 Montpellier, France

Dans un contexte de réduction de l’utilisation des herbicides, la plupart des vignobles français développent de l’enherbement permanent dans les inter-rangs, alors que le désherbage chimique sous le rang reste le cas général. La mise en place d’un enherbement contrôlé sous le rang de vigne pourrait être une alternative complémentaire au désherbage mécanique – très contraignant – intéressante d’un point de vue technique et économique. L’objectif de cette étude vise à évaluer les impacts agronomiques d’un enherbement sous le rang dans différentes conditions climatiques et objectifs de production.

Deux traitements de gestion du sol – l’enherbement sous le rang et le désherbage chimique, c’est-à-dire le sol nu – ont été comparés sur deux parcelles expérimentales situées dans le sud-ouest et les régions méditerranéennes de la France. Le pourcentage maximal d’enherbement par parcelle était de 100 % sur le site du sud-ouest et de 30 % sur le site méditerranéen. Les expérimentations ont été réalisées depuis 2007 sur le cépage Malbec au sein de l’AOP Cahors et depuis 2010 sur la Syrah au sein de l’IGP Vin de Pays d’Oc. Chaque modalité a été répétée trois fois dans un plan en blocs randomisés complets. Le suivi expérimental a été réalisé sur le moyen et long terme (six à neuf ans). Des données ont été collectées annuellement sur la production de la vigne – rendement, vigueur – et sur l’état hydrique et azoté (dynamique des potentiels hydriques, indice de chlorophylle foliaire, azote assimilable par les moûts).

Sur le site méditerranéen, l’introduction de l’enherbement sous le rang n’a pas entraîné de diminution significative du rendement ou de la vigueur. Sur le site sud-ouest, le rendement a été réduit pour cette modalité par rapport au sol nu la plupart des années de suivi, avec des variations en fonction du climat. L’objectif de production de l’AOP a néanmoins été atteint pour plus de 50% des millésimes étudiés. En ce qui concerne la vigueur, au cours des quatre premières années d’étude, une augmentation croissante de la différence relative entre le traitement de l’enherbement sous le rang et le sol nu a été enregistrée, jusqu’à atteindre -45%.  Nous n’avons pas observé d’adaptation de la vigne à la concurrence de l’enherbement. Depuis 2011, début de la fertilisation azotée, la différence de vigueur entre les modalités est stable avant d’être réduite. La proportion d’enherbement par parcelle semble être un facteur plus important que le contexte climatique pour expliquer l’impact de l’enherbement sous le rang sur la vigne.

La surveillance des indicateurs de l’état hydrique et azoté a montré que la concurrence de l’enherbement sous le rang s’applique sur l’azote plutôt que sur l’eau. Dans la région du sud-ouest, la fertilisation foliaire azotée a été appliquée après quatre ans d’enherbement sous le rang. Une forte réduction de la différence relative entre la modalité de l’enherbement sous le rang et le sol nu a alors été observée en termes de vigueur et d’azote foliaire.  Il apparait donc de la fertilisation d’azote foliaire semble limiter l’effet dépréciatif de l’enherbement sur la vigueur.

Figure 1 : Dynamique des différences entre l’enherbement sous le rang et le sol nu sur le rendement (a) et le poids des bois de taille (b) depuis l’année d’implantation du couvert. * différences significatives entre les modalités. Les flèches rouges indiquent les années où une pulvérisation foliaire a été effectuée

Figure 2 : Dynamique des différences relatives entre l’enherbement et le sol nu sur le statut azoté de la vigne depuis l’année d’implantation de l’enherbement : (a) azote des feuilles ( mesures au N-tester pour le site méditérranéen et Dualex pour le Sud-ouest) et (b) azote des moûts.
* indique les années où les différences entre les modalités sont significatives. Les flèches rouges indiques les années où une fertilisation foliaire a été appliquée

La mise en place d’un enherbement sous le rang de vigne est apparue comme une pratique viticole compatible avec différents ensembles de contraintes et d’objectifs relatifs à l’adaptation du système de production tels que la gestion de la proportion d’enherbement et l’adaptation des pratiques de fertilisation.

Share This