AGROBACTERIUM ET BROUSSINS DE LA VIGNE
Les broussins de la vigne, excroissances parfois spectaculaires, sont dus à une bactérie du genre Agrobacterium très répandue dans les sols et dans le matériel végétal. Ils ne causent des dégâts significatifs que dans des situations particulières liées à des stress (fortes gelées, blessures, …).
Quelle est la bactérie responsable des broussins de la vigne ?
Les broussins de la vigne, aussi appelés « tumeurs du collet », « trunk gall » ou « crown gall », sont dus à une bactérie du sol, Agrobacterium vitis, assez fréquemment retrouvée dans le système vasculaire des souches, où elle demeure le plus souvent sans provoquer de problèmes apparents. A l’occasion de blessures, souvent consécutives à un fort gel d’hiver, mais aussi à la faveur de plaies de taille, de greffage ou surgreffage, de dégâts de grêle ou d’impacts liés à des travaux culturaux, Agrobacterium peut induire la formation de tumeurs végétales parfois spectaculaires. Une propagation de ces bactéries peut se produire lors de la taille par les sécateurs, surtout en période de sève montante, ainsi qu’à l’occasion de travaux du sol si l’on cause des blessures aux souches.
D’autres espèces d’Agrobacterium sont également susceptibles de provoquer des galles sur de nombreux végétaux (arbres divers, framboisier, betterave, chrysanthème, …), voir ci-contre, broussin sur platane.
Comment se forment les broussins de la vigne ?
Le processus est bien connu aujourd’hui : il s’agit d’une transformation génétique naturelle. Agrobacterium introduit dans le génome des cellules de la vigne un fragment de son propre ADN, situé sur un de ses plasmides (petit chromosome circulaire). Certaines molécules synthétisées lors des blessures semblent capables de déclencher les gènes de virulence de ce plasmide et d’activer leur insertion. La destruction de tissus favorise également l’envahissement des cellules par les bactéries présentes dans les vaisseaux. L’introduction de ce fragment d’ADN bactérien dans le génome des cellules du cambium, provoque leur croissance autonome et anarchique, et induit la synthèse de substances nutritives utilisées par les bactéries pour leur développement. Ainsi, il se forme localement des galles, tout d’abord lisses et d’une teinte vert-jaunâtre, mais qui deviennent progressivement crevassées et tubéreuses en même temps que leur taille s’accroît.
Les capacités naturelles de ce genre bactérien ont été largement utilisées en laboratoire pour transférer des gènes dans divers organismes, en particulier pour transformer des végétaux. Dans ce cas, le plasmide impliqué subit une modification qui empêche la formation de galles, mais qui permet le transfert des gènes d’intérêt dans le génome cible.
Quelles peuvent être les conséquences de broussins sur vigne en place ?
Les galles peuvent être circulaires et former un cordon continu autour du tronc ou d’un bras, bloquant la circulation de la sève dans la souche et provoquant au final son dépérissement ou sa mort, ou former de véritables « chapelets » de tumeurs situées par exemple le long d’un tronc fendu par le gel. Il est également relaté dans la littérature la survenue de nécroses sur les racines, en particulier sur des jeunes vignes. C’est généralement dans les pays concernés par de forts gels d’hiver (Europe de l’est, Canada, …) que sont signalés les principaux problèmes.
Et en pépinière ?
On peut parfois retrouver ces manifestations, sous forme de galles plus réduites, dès le stade pépinière, essentiellement au niveau du point de greffe, mais aussi au talon des plants ou à une plaie d’éborgnage. C’est alors le signe d’une contamination liée au matériel végétal (greffon ou porte-greffe), mais cela peut aussi être consécutif à l’infection d’un substrat utilisé (sciures, tourbes, terreaux, …). Certains cas, rares mais avérés, ont d’ailleurs conduit à des litiges commerciaux, en particulier dans le cas d’exportations de plants vers des pays ayant des conditions plus favorables au développement de symptômes de broussins, et contrôlant parfois spécifiquement le matériel végétal importé. Un traitement à l’eau chaude tel qu’il est pratiqué dans le cadre d’une lutte prophylactique contre les phytoplasmes (50°C pendant 45 minutes) a montré une efficacité partielle sur les bactéries, et est parfois préventivement exigé par certains pays. Il est cependant signalé la possibilité pour certaines souches de bactéries de résister à ce couple température/temps, ce qui, contrairement à la flavescence dorée ou au bois noir et au vu des connaissances actuelles, n’en fait pas un moyen prophylactique sûr à 100%.
Y a-t-il des moyens de lutte au champ ?
La méthode la plus usitée consiste à tirer parti des propriétés bactéricides du cuivre, en pulvérisant ou badigeonnant de la bouillie bordelaise sur les vignes atteintes, immédiatement après la taille et avant le débourrement. Lors de la taille de vignes exprimant des symptômes, il est également conseillé de désinfecter les sécateurs (eau de javel par exemple) le plus souvent possible, la propagation par les outils, tout comme par les pleurs de la vigne, étant avérée. Cependant, ces bactéries du sol étant largement présente dans l’ensemble des vignobles, et la survenue des symptômes étant liée à des situations de stress particulières, ces mesures n’ont qu’une portée au champ très limitée.
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Olivier Yobregat
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